Le secteur de l’assurance maladie complémentaire fait-il face à une hyper-réglementation ? En 2020, le CTIP recensait près de 2 100 articles législatifs et réglementaires encadrant les institutions de prévoyance. Dans son étude « De l’inflation normative à l’effervescence réglementaire », réalisée à partir des textes parus entre 2019 et le premier trimestre 2024, un éclairage supplémentaire est apporté sur cette évolution.
Une pression législative accrue
Bien que la pression du cadre réglementaire du secteur de l’assurance maladie complémentaire ne soit pas un phénomène récent — la loi portant réforme de l’assurance maladie du 13 août 2004 ayant marqué un véritable tournant dans le paysage de la complémentaire santé avec la création du dispositif du contrat responsable — la tendance s’est nettement intensifiée au fil des années.
La généralisation de la complémentaire santé en 2016 et la réforme du « 100 % Santé » en 2019 ont accentué l’encadrement normatif des organismes complémentaires d’assurance maladie (OCAM). Entre 2016 et février 2024, pas moins de 177 textes ont été publiés. Malgré la fin de la crise sanitaire, l’année 2023 a connu une intensité législative supérieure à celle de 2019, renforçant la question de l’hyper-réglementation dans le secteur.
Concurrence et uniformisation des contrats
L’étude révèle également des effets contradictoires des réglementations récentes. D’un côté, la suppression des clauses de désignation, la résiliation infra-annuelle et la résiliation en trois clics ont intensifié la concurrence entre les acteurs du secteur. De l’autre, l’introduction du contrat responsable et du « 100 % Santé » a engendré une uniformisation des garanties, réduisant la diversité des offres proposées par les OCAM. Cela limite leur capacité d’innovation et la personnalisation des garanties selon les besoins des assurés.
En outre, ces différentes réformes ont progressivement réduit la liberté de négociation des partenaires sociaux dans un domaine qui relève pourtant pleinement du champ de la négociation collective. L’adaptation des couvertures aux spécificités des branches professionnelles et des entreprises s’avère donc délicate en pratique, au préjudice des salariés dont la situation professionnelle ou géographique emporte des incidences majeures en matière de santé.
Explosion des règles de conformité
Simultanément à l’uniformisation des contrats, les OCAM doivent se conformer à une multiplication croissante de règles, notamment en matière de protection des données, de lutte contre le blanchiment d’argent et de financement du terrorisme. Cette complexité génère des coûts non négligeables.
Le rapport 2024 de la Cour des comptes estime que la mise en conformité avec la directive CSRD (corporate sustainability reporting directive) sur le reporting de durabilité pourrait coûter entre 40 000 et 320 000 € par entreprise, avec des frais d’audit annuels pouvant aller jusqu’à 540 000 €. Des charges qui pèsent particulièrement sur les institutions de prévoyance dont le modèle repose sur la non-lucrativité et la solidarité.
Défis pour l’avenir des OCAM
Comment les OCAM pourront-ils se développer dans ce contexte tout en maintenant leur compétitivité et en offrant une couverture étendue aux salariés et à leur famille ? C’est en menant des études comme celle-ci et en facilitant un dialogue constructif basé sur l’expertise des IP et les perspectives des partenaires sociaux, que le CTIP contribue à éclairer le débat.
Prévoyance, le magazine du CTIP
Cet article fait partie du numéro 82 de Prévoyance, le magazine trimestriel du CTIP. Il existe en version papier et en version newsletter. S’abonner en cliquant ci-dessous.